Avec la loi sur l’École de la confiance, la formation des enseignants a évolué : depuis la rentrée 2019, au prétexte d’hétérogénéité, les INSPE (Instituts Nationaux Supérieurs du Professorat et de l’Éducation) ont remplacé les ESPE (Écoles Supérieures du Professorat et de l’Éducation) et un dispositif de préprofessionnalisation a été mis en place. La mainmise idéologique par le ministre de l’Éducation Nationale sur l’institution des formations des enseignants est alors lancée.
Dans le
cadre de la réforme de la formation, le MEN a modifié le niveau de
qualification requis pour passer le concours, les épreuves de concours mais
également le contenu des formations.
1°- Réforme
des concours
Les nouveaux arrêtés fixant les épreuves des CAPES, CAPEPS, CAPET,
CAPLP, concours CPE et CRPE ont été publiés au Journal Officiel le
vendredi 29 janvier 2021 dernier. A partir de 2022, les concours d’enseignants seront retardés d’une
année, passant ainsi du master 1 au master 2. Le Ministère
de l’Éducation Nationale n’a tenu aucunement compte de la très large opposition
qu’a suscité sa réforme, qui concernera les sessions 2022 et suivantes de ces
concours.
Les nouveaux concours seront organisés en quatre ou cinq épreuves (selon
le degré d’enseignement), dont la dernière, passée à l’oral, sans préparation,
sans contenu disciplinaire, didactique ou pédagogique, ressemble fortement à un
entretien d’embauche. La FSU en avait demandé l’abandon. Cette épreuve porte
sur « la motivation du candidat », sa capacité à « s’approprier
les valeurs de la République [et] à faire connaître et faire partager ces
valeurs » ainsi que sur « la qualité d’analyse d’une situation
professionnelle ». Elle pèsera lourd dans le concours (coefficient 3 sur 8
pour les oraux), en comparaison de l’évaluation des savoirs à enseigner et des
savoirs pour enseigner. La FSU se bat pour que cette épreuve
d’ « oral d’entretien » ne se cantonne pas qu’à des réponses
formatées.
La définition des épreuves était la dernière pièce qu’il manquait à la
réforme de la formation des enseignant·es annoncée par Jean-Michel Blanquer à
l’été 2018. Cette réforme qui porte le concours à la fin de la deuxième année
de master, sans aucun dispositif ’accompagnement des étudiant-es qui se
destinent à nos métiers, tel que le pré-recrutement que revendique la FSU, ne
répond à aucune des urgences présentes : attirer davantage de candidat-es,
et mieux les former avant et après le concours. Le nouveau Master MEEF, qui
fait la part belle à l’alternance (ce qui permettra d’utiliser des étudiant-es
non recruté-es dans des missions d’enseignement), et ces nouvelles épreuves,
censément plus professionnelles, justifient aux yeux du Ministère, qu’après
leur succès, les lauréat-es soient pour la plupart, affecté-es à temps plein en
responsabilité de classe. L’entrée dans le métier des nouveaux enseignant-es
sera donc sacrifiée, comme cela avait été le cas entre 2010 et 2014.
La FSU et ses syndicats n’acceptent pas cette situation et demandent à
nouveau l’abandon de cette réforme.
2°- Réforme
des masters MEEF
Les
nouvelles maquettes de formation proposées par le MEN transformeront en
profondeur la formation et la vision du métier : réduction du volume des
formations, étudiant.es comme moyen d’enseignement …
Qui pourrait
croire qu’une telle réforme permettrait de répondre aux enjeux d’attractivité
pour le métier et d’amélioration qualitative du service
public d’éducation ? Tout ceci est signe d’une entrée dans le métier
par la précarité et sous-pressions.
3°- Quelles conséquences pour le travail des formateurs ?
L’arrêté
ministériel du 28 aout 2020 impose que les équipes assurant la formation des
enseignant.es soient constituées « pour
au moins un tiers du potentiel d’heures d’enseignement de professeurs des 1er
et 2nd degrés » ou de personnels exerçant en établissement
« privilégiant les détenteurs de
fonctions de professeurs des écoles maîtres-formateur ou professeur
formateur-académique ». Des personnels choisis par l’employeur donc
pour diffuser « la bonne parole » et remplaçables à tout
moment ?
La question
est celle de la place des « professionnels » dans les masters, de
leur attractivité et leur reconnaissance, y compris en termes de décharges de
temps de service et de compensations financières. Il est difficile de construire
des collectifs de travail sans que soient identifiés et reconnus des temps
d’articulation, de co-construction d’équipes. A l’avenir, la formation ne sera
réduite qu’à la juxtaposition formelle de personnels de différents statuts,
affaiblissant de ce fait le principe même de collectif de travail, de cohérence
et de la qualité des formations master.
4°-
Perpétuelle précarité des étudiants – Rémunération des étudiants
Pour la FSU,
le projet Blanquer pour la formation des enseignant.es ne va faire que renforcer
la précarisation de l’entrée dans les métiers de l’éducation, pour les
étudiant.es d’abord, qui devront poursuivre leurs études en master, tout en
ayant une ou des classes en responsabilité, dans une zone géographique parfois
déjà éloignée de leur site de formation.
850 euros
brut pour un.e étudiant.e en master en alternance, ce n’est clairement pas
suffisant au regard de la charge de travail engendrée par la préparation des
cours, du master et du concours pour certain.es.
D’autre
part, ces nouveaux contrats par alternance dévalorisent le statut et ne
garantissent pas l’avenir de la future génération d’enseignant.es.
Le recours
accru à des précaires et de passage des lauréat.es issu.es de master MEEF à
temps plein sont des moyens pour le MEN de baisser les postes aux concours une
fois de plus.
La crise
COVID aggrave la paupérisation fragilisant les viviers étudiants. Le Ministre
Blanquer décale le concours en M2, mais quel financement propose-t-il aux
actuels étudiants de L3, qui passeront le concours en 2023 ? Aucun.
Pour la FSU
et ses syndicats, ce n’est pas ainsi que l’on rendra à nouveau attractifs les
métiers de l’éducation.